"J'ai commencé à peindre chez les fous... j'y ai découvert l'univers sombre de la folie et sa guérison, j'y ai appris à traduire en peinture mes sentiments, les peurs, la violence, l'espoir et la joie."
Niki de Saint Phalle
Catherine Marie-Agnès Fal de Saint Phalle naît le 29 octobre à Neuilly-sur-Seine sous le signe du scorpion ascendant scorpion.
Son père, propriétaire, avec ses sept frères, de la banque familiale, était devenu en 1927 directeur de la filiale new-yorkaise.
Les trois grâces selon Niki
La vie et l'oeuvre de Niki de Saint Phalle sont liées de façon quasi indissoluble comme chez peu d'artistes de sa génération.
Mais suite au crash boursier il avait perdu toute sa fortune en 1930.
[Niki de Saint-Phalle]
Marie-Agnès et son frère John sont envoyés chez les grands-parents paternels en France où ils passeront les trois années suivantes.
En 1933 Marie-Agnès rejoint ses parents à Greenwich, dans le Connecticut.
Elle passe régulièrement les mois d'été en France au château de Filerval, propriété de son grand-père maternel.
En 1937 sa famille s'installe dans un appartement à New York, et Marie-Agnès est envoyée à l'école religieuse du Sacré-Coeur, d'où elle sera renvoyée en 1941.
On l'envoie dans le New Jersey chez ses grands parents qui ont quitté la France à cause de la guerre.
Un an plus tard Niki revient vivre chez ses parents, qui l'inscrivent à la Brearly School à New York.
Elle lit Edgar Allan Poe, Shakespeare et les tragédies grecques.
Elle participe aux représentations théâtrales de l'école et écrit ses premières pièces et poèmes.
En 1944 Niki peint en rouge vif les feuilles de vigne qui couvrent pudiquement les statues grecques de l'école.
La directrice décide qu'elle ne sera gardée qu'à condition qu'elle soit suivie par un psychiatre. Ses parents l'envoient en pension à l'école religieuse de Suffren, dans l'Etat de New York.
En 1947 Niki de Saint Phalle passe son baccalauréat à la Oldfield School dans le Maryland.
Niki, une très jolie femme
A 18 ans elle décide de quitter le carcan familial et épouse Harry Mathews, un marine, pour s'échapper.
Ils auront deux enfants : Laura (1951) et Philip (1955).
Elle se révolte contre le rôle de femme qui lui est destiné, mais elle ne parvient pas encore à s'en détacher.
Niki rêve encore d'une vie d'actrice et travaille comme mannequin pour des revues de modes telles Vogue et Harper's Bazaar et une photo d'elle parait en couverture de Life Magazine.
La conscience douloureuse qu'elle a de la contradiction entre ses aspirations à l'indépendance et sa vie quotidienne est telle qu'on doit l'hospitaliser en 1953 pour une grave crise nerveuse.
Elle continuera pendant ce séjour à peindre à l'huile et sa volonté de devenir artiste l'aidera à surmonter cette crise.
Elle apprend à assumer son agressivité.
D'abord de façon passive en collectionnant les pistolets, les couteaux et les instruments de boucher pour les assembler en montages.
[Jean Tinguely]
Paris, 1957
Avec ces instruments meurtriers elle menace dans son imagination tous les hommes qui pourraient constituer pour elle un obstacle émotionnel ou réel.
Puis elle envoie des fléchettes sur des figures symboliques de ces hommes et tire dessus avec une arme. L'acte de tirer revêt alors pour Niki une signification de plus en plus importante, de sorte que les attributs masculins passent bientôt au second plan.
Elle tire sur tous les objets possibles et imaginables qu'elle a auparavant retravaillé avec du plâtre et des couleurs pour en faire des reliefs.
C'est quand elle est admise au sein du groupe des "Nouveaux Réalistes" et que la presse internationale commence à s'intéresser à ses actions de tir qu'elle comprend qu'elle a atteint son but, celui d'être une "artiste professionnelle".
En 1955 elle découvre l'architecture de Gaudi et sa manière d'utiliser des matériaux décoratifs et des objets trouvés pour animer artistiquement les surfaces.
Le rêve de réaliser un jour son propre jardin de sculptures est né.
C'est en 1974 lors d'un séjour à Saint Moritz pour une cure de repos qu'elle rencontre Marella Caracciolo, princesse napolitaine et épouse de Giovanni Agnelli. Les deux femmes se lient d'amitié.
Après avoir vu une maquette du projet les frères de Marella sont très enthousiastes et ils mettent un terrain, situé en Toscane, à la disposition de Niki afin d’y créer son jardin de sculptures.
Inauguré en 1998, le Jardin des Tarots est continuellement enrichi de nouvelles œuvres intégrées par l'artiste à l'ensemble.
En 1960 Niki et Harry se séparent et à la fin de l'année elle s'installe avec Jean Tinguely impasse Ronsin où ils partagent le même atelier.
Leur vie de couple privée comme professionnelle est turbulente et ressemble bien souvent à une partie de ping-pong, mais ils s'adorent, dans laquelle :
" on se lançait sans arrêt la balle " comme le décrivait Niki.
Le fil conducteur de leur relation
" Who is the monster, you or I " nous est donné par Niki en personne.
La reconnaissance de son oeuvre ne fut pas immédiate.
Son monde pictural anticonformiste et direct n'est tout d'abord pas pris au sérieux.
Et si les éclats de soleil sont déjà sur la grève des souvenirs, cela n’est pas une raison suffisante pour se morfondre.
Dès 1962 pourtant, le célèbre galeriste Alexander Jolas lui donne l'occasion de présenter son travail.
En 1965, elle montre à Paris ses premières Nanas de papier mâché, fil de fer et laine.
Après avoir été ignorée ou méconnue, son oeuvre obtient enfin une reconnaissance générale en 1980, lors de la grande rétrospective organisée au Centre Georges Pompidou.
Le public découvre alors la richesse et l'étendue de ses recherches artistiques. Niki trouve d'ardents défenseurs de son oeuvre en Hollande et en Allemagne.
En 1973, malgré une opposition farouche, la ville de Hanovre lui commande la réalisation de trois nanas monumentales.
L'artiste n'oublia jamais cet engagement et gratifia, en 2000, le Sprengelmuseum de Hanovre d'une importante donation. En 1980, la cité d'Ulm montre pour la première fois son œuvre graphique. Enfin sa popularité culmine en 1992, lors de l'importante exposition de Pontus Hulten à Bonn.
Elle meurt le 21 mai 2002, à San Diego en Californie, des suites d'une longue maladie.
En raison de son travail avec le polyester, matériau dont on ignora longtemps la toxicité des émanations, elle souffrait d'une affection chronique des voies respiratoires.
Niki de Saint Phalle, une artiste pas comme les autres
Cette artiste française membre du courant du nouveau réalisme a sut révolutionner à sa manière l’art, et mettre beaucoup de couleurs dans nos vies autant que dans la sienne, en effet, sa biographie est digne d’un roman.
Niki, une femme extraordinaire
Catherine Marie-Agnès Fal de Saint Phalle de son vrai nom est né le 29 octobre 1930 à Neuilly-sur-Seine dans une famille plutôt aisée.
Deuxième enfant d’une grande fratrie, son père André Marie Fal de Saint Phalle fait parti d’une grande famille des magnats de la finance, suite à la crise de 1929 la famille perd sa fortune et Niki est envoyé vivre chez ses grands parents dans la Nièvre, tandis que ses parents déménagent dans le Connecticut aux Etats-Unis.
Ce n’est que 3 ans plus tard, qu’elle rejoint ses parents en Amérique.
En 1937, la famille déménage une nouvelle fois, et s’installe à New York ou Niki intègre la Convent School of the Sacred Heart.
A l’âge de 11 ans, Niki est renvoyée de son école et déménage donc dans le New Jersey ou elle rejoint ses grands parents venus s’installer en Amérique pour fuir la Seconde guerre mondiale.
Après cette année de césure, Niki revient à New York ou elle intègre la Brearley School et commence à s’intéresser à la littérature et au théâtre.
En 1944, Niki change encore une fois d’école après avoir dégradé les locaux en peignant sur les statues de son école.
En 1947, Niki obtient son diplôme et commence à travailler en tant que mannequin et pose pour Vogue, Bazaar… Alors qu’elle n’a que 18 ans elle se marie avec un jeune homme engagé dans la marine.
En 1950, alors que son mari Harry Mathews étudie la musique à Harvard, Niki commence à peindre.
En 1951, à l’âge de 21 ans seulement, Niki de Saint Phall donne naissance à sa fille, Laura.
En 1952, la petite famille déménage à Paris, ou Harry continue la musique et Niki commence à étudier le théâtre.
L’année 1953 est une année difficile pour Niki qui fait une grave dépression, tandis qu’elle est soigné à Nice, elle réalise que la peinture l’aide à exprimer ses émotions et elle décide alors d’abandonner le théâtre pour la peinture.
Durant ce temps, Harry lui aussi abandonne la musique et écrit son premier roman.
En 1954 après avoir rencontré son mentor, le peintre américain Hugh Weiss, le couple déménage sur une ile à Majorque.
Alors qu’ils vivent en Espagne, Niki en profite pour découvrir le pays et découvre le travail de Gaudi, elle est transformé par cette expérience et reste à jamais transcendé par le Parc Guell de Barcelone.
C’est alors que le deuxième enfant du couple, Phillip nait.
En 1956, Niki expose pour la première fois ses oeuvres à la galerie St Gallen.
Le couple ré déménage à Paris et fréquente alors de nombreux artistes de l’époque, musiciens, auteurs, peintres…
C’est à cette époque que Niki rencontre Jean Tinguely et lui demande de lui fabriquer une sculpture faite de fer qu’elle va par la suite recouvrir de plastique.
En 1960, Niki et Harry se sépare et Harry déménage avec les enfants, tandis que Niki s’installe avec Jean.
Ainsi son nouvel amant va lui faire rencontrer de nombreuses personnalités influentes dans le monde de l’art qui vont lui acheter des œuvres pour les exposer dans des musées.
C’est en 1961 que la carrière de Niki va véritablement décoller, elle participe à de nombreuses expositions et rencontre de nombreux peintres comme Dali.
Durant de nombreuses années le couple va alors voyager autour du monde, puis se marier en 1971 la même année ou Niki deviendra grand-mère.
Le couple vivra heureux jusqu’en 1991, l’année ou Jean meurt.
Le nouveau réalisme ?
Le nouveau réalisme est un mouvement qui a été développé
en France notamment par Yves Klein.
Les artistes souhaitent un retour à la réalité face au développement de la peinture abstraite.
Ainsi les artistes accumulent des objets de la réalité quotidienne pour en faire des œuvres.
La Mariée de 1963 est composée, au niveau du torse, d’un amoncellement de poupons, fleurs artificielles en plastiques et autres jouets signifiant le conditionnement qu’ils perpétuent sur le devenir de l’être humain.
L’unité, donnée par l’aspect monochrome qui se dégage de sa blancheur immaculée, renvoie à l’idée préconçue de candeur, pureté, virginité, autres carcans infligés à la femme lorsque cette dernière gravit des rites de passage
(communion, mariage).
Comme l’assigne Roland Barthes dans Mythologies :
« Les jouets courants sont essentiellement un microcosme adulte ; ils sont tous reproductions amoindries d’objets humains, comme si aux yeux du public l’enfant n’était en somme qu’un homme plus petit, un homunculus à qui il faut fournir des objets à sa taille » (…)
Pour le reste, le jouet français signifie toujours quelque chose, et ce quelque chose est toujours entièrement socialisé, constitué de mythes ou les techniques de la vie moderne adulte (…)
Que les jouets préfigurent littéralement l’univers des fonctions adultes ne peut évidemment que préparer l’enfant à les accepter toutes. »
Ce mouvement apparut en même temps que le pop art américain est souvent présenté comme son alter-ego français.
Les artistes souhaitent avoir un nouveau regard sur l’objet, la présence de couleurs et de différents matériaux accumulés est une de leur caractéristiques distinctive.
Le succès de Niki
Niki de Saint Phalle dès son plus jeune âge se révolte contre le rôle de la femme dans la société qu’on lui oblige à adopter.
Cependant en devenant épouse et mère dès son plus jeune âge, elle se conforme à une place au sein d’une famille.
C’est pourquoi Niki tombe dans une grande dépression, tiraillée entre son rêve d’être une femme indépendante avec des aspirations et son rôle de mère dans sa vie quotidienne.
Ce malaise va alors s’exprimer dans son art, mais Niki va aussi chercher l’inspiration dans un évènement plus sombre de son enfance :
le viol dont elle a été victime par son père à l’âge de 11 ans.
A l’âge adulte, Niki refoule sa haine contre les hommes, et commence à collectionner des armes blanches.
Afin de canaliser son agressivité, elle va tirer sur des sculptures qu’elle a elle même réalisé. C’est suite à ce rituel que Niki va être inspiré et réaliser sa première œuvre à succès :
Les tirs.
Les individus peuvent interagir avec l’œuvre car c’est grâce au décharge faites par des carabines que les tubes de peintures vont pouvoir se déverser et créer une toile. Alors admise dans le clan très fermé des nouveaux réalistes, Niki va connaitre le succès.
Cette œuvre est un véritable exutoire pour Niki qui va permettre à sa haine de s’exprimer.
Niki cherche aussi à changer la représentation artistique de la femme, et va briser les codes de l’esthétique du XXème siècle en créant les Nanas, composés de papier maché, de fil, de grillage et de laine.
En France son travail n’est pas très bien critiqué et il faudra attendre les années 1990 afin que ses œuvres soient reconnues, pourtant Niki trouve son succès en Allemagne, en Hollande et en Suède, ou elle créera « Hon » une gigantesque nana de 28 mètres sur 9.
En 1974, alors qu’elle est ami avec Marella Agnelli et qu’elle partage avec elle son rêve de faire un jardin remplit de sculptures à la manière de Gaudi, elle se voit offrir un espace en Toscane pour réaliser son rêve.
Le jardin des Tarots à Capalbio en Toscane est achevé en 1985 mais n’ouvrira ses portes au public qu’en 1998.
Niki en plus de la peinture écrit de nombreux scénarios de films, dessine des bijoux, crée des parfums…
C’est une artiste polyvalente qui touche à tout, ainsi elle crée sa première fontaine pour la ville de Paris en 1982.
Après la réalisation de nombreuses œuvres commandées un peu partout autour du monde, Niki décède suite à une maladie qui touche ses poumons.
La fontaine Stravinsky à Paris
En effet durant toutes ces années elle n’était pas au courant que le travail du plastique était toxique pour ses poumons, et elle s’éteindra en laissant des centaines de ses œuvres derrière elle.
Le jardin des tarots, l'oeuvre d'une vie de Niki
Il y a toujours des passages houleux dans une existence.
La générosité qui rayonne de l'œuvre si peu doctrinaire de Niki de Saint Phalle a peut-être le pouvoir d'apaiser nos inquiétudes réelles ou fallacieuses. Pourquoi a-t-on jugé son oeuvre, sinon mineure, du moins marginale?
Sans doute pour un certain nombre de raisons, en général sans grand intérêt (misogynie, indifférence, manque de curiosité, préjugés).
Mais il y a probablement des raisons plus profondes. Le rationalisme scientifique aura gouverné le XXe siècle.
Malgré la merveilleuse clairvoyance de Dada, malgré les incursions des surréalistes dans des domaines inaccessibles à la conscience, malgré le cubisme et malgré notre individualisme fondamental, l'exaltation du bonheur de vivre, dont Matisse se fit le chantre, n'est plus à l'ordre du jour.
Or, ce bonheur nourrit toute l'œuvre de Niki de Saint Phalle, même si quelques angoisses percent çà et là. Il diffuse une lumière qui chasse les ombres flatteuses, ce qui n'est pas du goût de tout le monde.
Pontus Hulten
http://mine-dart.blogspot.fr/2011/03/artiste-myo